Non ce n’est pas un gros mot.
J’ai beau être la dernière des snobs qui râle qu’il y a toujours trop de monde dans les expositions et les musées parisiens, j’apprécie à sa juste valeur le fait que nos lieux d’expositions organisent de l’art pour tous.
A l’heure où le Français moyen passe plus de 3 heures par jour devant les horreurs et la médiocrité proposées par la télévision, il est rassurant de voir aussi qu’ils sont prêts à patienter pendant des heures ou à s’organiser (le week-end à Paris, le train, la bagnole et tout et tout!) pour venir voir une des grandes expos organisées par le Louvre, le Grand Palais, Orsay ou Beaubourg.
Sauf que ces belles institutions sont parfois totalement à côté de la plaque.
On n’organise pas une exposition pour les foules, où on attend des centaines de milliers de visiteurs (de clients m’a dit un jour un gardien du Louvre excédé par le mauvais traitement infligé aux visiteurs) à 13€ l’entrée comme on organise un accrochage dans une galerie pour happy fews connaisseurs.
Des salles trop remplies d’œuvres, des toiles accrochées à hauteur d’yeux d’une personne de 1,60m, des titres de tableaux écrits en police 14 (Ouf! On a échappé au Comic sans MS!!), l’absence de limitation évitant de voir des gens le nez collé sur des tableaux (Ton papa n’était pas vitrier, tu sais? Vas-y lèche la toile!), des espaces de projection vidéo grands comme des mouchoirs de poche quand on ne limite pas – ou si peu – le nombre de visiteurs dans une exposition, c’est un gâchis. Pire, c’est de l’incompétence quand on voit les réussites qu’ont pu être certaines expositions.
Et puis la gestion de la billetterie… Franchement.
En 2013 il reste des musées où l’on n’arrive pas à mettre en place des vrais créneaux horaires pour les billets réservés.
Où l’on ose vendre comme coupe-file une carte qui ne l’est pas.
Sérieusement. Vous vendez les billets entre 11 et 13€ les mecs. 90 francs un billet pour une exposition où les gens attendent longtemps avant de ne pas voir grand-chose.
« La conférencière dit qu’on peut passer 5 heures dans l’expo sans réussir à tout voir! » Ai-je entendu mercredi soir sur les coups de 22h dans l’expo Dali de Beaubourg.
Sauf que ça ce n’est possible que dans des conditions irréalistes. Personne à part les quelques personnes invitées en avant-première à cette rétrospective ne peut le faire.
Je n’avais jamais autant eu envie de prendre la fuite que devant cette exposition tant son organisation et sa scénographie sont mauvaises.
C’est la première que je parcours une exposition sans réussir à voir correctement une seule toile.
Et pourtant je les ai toutes faites les expos monstres du Grand Palais, j’ai pesté après les longues minutes d’attente même avec une carte Sésame (mais je savais malgré tout que j’étais « privilégiée »), mais j’ai toujours pu admirer les toiles tout mon saoul, j’ai toujours réussi à voir les plus grandes expos plusieurs fois (ne serait-ce qu’en coup de vent, pour passer me remplir les yeux de mes œuvres préférées).
Pour Dali je pressens que c’est impossible, parce que la carte d’abonné n’est pas un vrai coupe-file, parce que la scénographie est trop inadaptée à la foule qui se masse devant les toiles.
Lorsque l’on fait quelque chose il faut le faire bien.
Quoi que l’on fasse. Et lorsque l’on organise une exposition monstre, une exposition que l’on attend depuis 30 ans, on le fait bien. Vraiment bien.
Pas pour les conférenciers, les spécialistes ou les snobs du ministère de la culture – eux ont tous les accès VIP qu’il faut pour cela – on le fait bien pour Mr et Mme Tout-Le-Monde, pour ces gens qui se tapent un aller-retour à Paris le samedi pour voir cette fichue expo, les gens qui vont attendre 4 heures avant de pouvoir entrer pour apprendre à connaître Dali, pour ces gens qui veulent éveiller leur curiosité, titiller leurs neurones et leurs yeux, qui veulent s’émouvoir, se faire choquer, se faire surprendre, s’enthousiasmer, ne pas comprendre (mais essayer très fort), détester peut-être, mais ces gens qui ont envie de culture un peu pointue quand la télévision leur sert de la soupe bêtifiante.
Le snobinard culturel sera choqué qu’on ouvre un musée 24 heures sur 24 pendant quelques jours pour laisser les noctambules aller admirer des tableaux, et bien qu’on les laisse être choqués et qu’on arrête d’installer des expositions comme si elles étaient destinées à 20 personnes.
Je n’ai jamais été déçue comme je l’ai été cette semaine à Beaubourg, pour la première fois de ma vie j’ai eu envie de quitter un musée alors que je venais d’y entrer, j’ai passé 1h30 à me dire qu’on se foutait de ma tronche.
Cher Centre Pompidou, je déteste ça.
Et oui… Et pourtant ces gens sont payés pour ça, pour organiser ce genre d’événement monstre. Et c’est dommage que ça ne soit pas correctement accessible à tous.
A Metz, depuis 2010 nous avons la chance d’avoir le centre Pompidou aussi. Alors peut être que Laurent Lebon est plus inspiré que son homologue parisien, mais les expos se passent bien, on peut toujours tout voir, même au début, quand il fallait faire 4 heures de queue pour voir Chefs d’Oeuvre. Alors je te le concède aisément, Metz n’est pas Paris, loin s’en faut, et le nombre de visiteurs n’est pas le même non plus, mais tout de même, la façon de faire est la même, non? Le but c’est quand même bien de faire que les gens puissent voir correctement les oeuvres, sans se bagarrer pour grapiller 30 secondes dans la cohue devant une toile, sans avoir attendu 5 heures sous la pluie et se faire accueillir sans même un sourire ou un bonjour.
Le week end dernier nous étions en vadrouille dans le Nord, à Lens au Louvres. Quel bonheur… Il y avait du monde, mais la circulation est fluide, bien pensée. Plusieurs entrées, de nombreuses caisses ouvertes (l’expo est gratuite la première année mais il faut tout de même un ticket, et puis nous voulions voire l’expo temporaire qui elle est payante), on récupère rapidement ses audio guides, et on peut déambuler tranquillement dans cette galerie du Temps, sans se sentir oppressé, se poser, admirer. Aller faire pipi sans craindre le typhus et sans patauger (ahem…). Bref, pour nous provinciaux, c’est le top… Alors oui, les délocalisations de grands musées nationaux sont encore trop rares, mais on en profite, car je t’avouerais que j’aurais adoré aller voir Monet et Hopper au Grand Palais. Mais même si ces expo étaient très bien organisées, ne pas maîtriser les temps d’attente, quand justement ton temps est compté, je trouvais ça dommage, voir ces maîtres l’oeil fixé sur la montre ne me tentait pas. Alors j’ai vécu ça par procuration, et un petit peu grâce à toi et tes billets qui nous ont raconté. Et pour ça, merci. ❤
Bonjour,
Je l’écris sans animosité et comprends bien que l’essentiel de ton propos n’est pas là, mais je trouve que sous une apparence humaniste, tes propos concernant « la masse se rendant au musée » sont condescendants et caricaturaux…
Bonjour Ema, surtout que je fais partie de cette masse, je suis définitivement une madame tout le monde qui aime apprendre en me rendant dans les musées 😉
Mais là où tu as raison, c’est que cette condescendance existe, chez une partie des gens (pas tous heureusement!!) qui organisent ces expositions montres. Qu’ils la laissent au vestiaire et fassent de vraies expos pour le grand public, il n’y a rien de mal à ça, bien au contraire.
J’espère que Beaubourg et les responsables de cette exposition tant attendue t’entendront. Mais son organisation et sa scénographie sentent tellement l’échec que je n’en doute pas. J’espère que les personnes en charge de tout ça sont « un peu » dans leurs petits souliers pour tous ces gens qui ont payé mais n’ont rien vu ou presque. Si l’on me dit qu’ils s’en foutent car quelques happy fews, ceux dont l’avis importe, sont contents, je ne serai pas surprise… mais dégoutée.