Lorsque l’on travaille chez un éditeur de jeux vidéos il y a une chose (entre autres) qui est très très sympa: le développement des jeux associés à des films. Cela donne en général lieu à une projection privée du film en question.
Il y a deux ans c’était « Avatar », quelques années auparavant c’était « King Kong », cette année c’est « Tintin et le secret de la Licorne ». De très grosses productions donc. On aime ou on n’aime pas le genre, il reste que du grand spectacle au cinéma, c’est toujours un petit bonheur en soi.
Je vais être honnête: je redoutais le pire de cette adaptation. Spielberg et Jackson sont de merveilleux professionnels qui ont de plus de très gros moyens à leur disposition, et bien que voulez-vous, Tintin c’est sacré et il est hors de question de faire n’importe quoi avec.
Et puis Tintin est Belge. Plus vieux continent tu meurs! Alors nos amis anglo-saxons vous êtes très gentils, mais le risque que vous passiez à côté de l’esprit du personnage et de son environnement est quand même énorme. Et puis on ne peut pas dire que Tintin & Co soient des « winners Hollywood-proof » si voyez ce que je veux dire: Haddock est un énervé très alcoolisé et semeur de catastrophes en tous genres, les Dupond-t sont des boulets de première catégorie, le Professeur Tournesol est un inventeur génial certes, mais il est aussi – et surtout – totalement frapadingue (en plus d’être sourd comme un pot). Quant à Tintin et son cher Milou, et bien le premier a le charisme d’une petite cuillère(si si, quand même) et Milou est mignon et plutôt futé, mais il a un certain penchant pour la binouse lui aussi et entre sauver son maître un voler un poulet rôti, il y a toujours un vrai risque qu’il choisisse la seconde option.
Bref, pas forcément de quoi faire rêver l’Amérique profonde (qui aime les super-héros qui mettent leur slip sur leur collant… punaise, le mec met des collants quoi!!! Et ça fait rêver l‘Amérique… OK, rendez-moi Tintin, ses copains barrés et sa houppette!).
Mais les héros sont bien définis, l’univers est riche, intelligent, varié, on comprend sans mal que des hommes comme Spielberg et Jackson aient eu le même coup de foudre que nous pour Les Aventures de Tintin.
Et ce film alors?
Première grande qualité, il m’a donné une envie irrépressible de me ruer sur les albums de Tintin et de les relire, en premier lieu « Le crabe aux pinces d’or », « Le secret de la Licorne » et le « Trésor de Rakham Le Rouge » qui ont servi de base au scénario. Que j’ai trouvé intelligemment écrit soit dit en passant.
Avant de voir le film je me demandais comment ils avaient réussi à faire un condensé des trois ouvrages pour que cela soit exploitable au cinéma. Pas mal du tout, les éléments clé des deux premiers ouvrages sont là. Pour le troisième, il faudra attendre la suite du film pour en voir les éléments clés.
Les personnages ensuite. Evidemment adaptés pour le marché américain, mais ce sont bien eux, avec leurs costumes, leurs petites phrases, leur tempérament.
J’aurais fait un capitaine Haddock moins « clochard imbibé » (désolée pour le politiquement incorrect mais je n’ai pas trouvé mieux) mais il est vraiment dans un état pitoyable dans « Le crabe …» donc pourquoi pas.
Milou est mon chouchou absolu, c’est vraiment le petit chien de la BD: futé, teigneux, parfois totalement étourdi par de bonnes vapeurs d’alcool ou le fumé d’un poulet, mais totalement dévoué à son maître et avec un vrai caractère.
Tintin reste le sujet sensible. Il sera toujours le sujet sensible, car malgré les prouesses technologiques hallucinantes du film (bluffant, proprement bluffant), Tintin est le seul personnage pour lequel on voit un acteur interpréter Tintin. J’ai été complètement incapable de reconnaître les acteurs sous le « masque » de leurs personnages de synthèse. Sauf pour Tintin. Qui est sympathique et chez qui on retrouve bien le personnage d’Hergé. Mais il n’a pas la tête de Tintin.
J’ai adoré le générique de début du film, très beau, très respectueux du monde de Tintin que j’ai dans la tête, et le génial et adorable clin d’œil d’ouverture du film. Vous avez gagné 5000 points en une scène Steve, chapeau bas, c’est vraiment joli.
Et dans ce qui m’a moins plu? Une scène de baston de grues vraiment pas Tintin, des enchaînements de scènes d’actions pleines de choses très Tintin, mais dans leur globalité pas Tintin du tout. Tintin est un jeune homme posé qui prend le temps de réfléchir, qui prend le temps de vivre et qui ne passe pas 48h à se mettre sur la tronche avec des méchants. Non, ça ce n’est pas Tintin du tout.
Mais pas de quoi crier au crime pour autant, car ces scènes là sont du Spielberg pur sucre. Et jusqu’à preuve du contraire, il fait ça très très bien. C’est davantage Indiana Jones que Tintin, mais le second a inspiré le premier, alors disons que la boucle est bouclée et ne boudons pas notre plaisir. Si nous voulons que les petits américains découvrent le plus fameux petit reporter belge, il faut un peu le mettre à leur portée.
Et puis vraiment, un film qui fait que je viens de passer quatre jours le nez dans les vieux albums de Tintin de Mr Papillon et ses sœurs ne peut pas être un mauvais film 😉
Chouette article 😉 Le personnage de Tintin version Spielberg ne m’a pas autant gêné que toi, bien qu’un peu trop juvénile à mon goût… Effectivement, le générique, une vraie réussite !!!
Bonne journée 😉
Et bien, tout ce que j’aurais voulu dire est là :o)
Et pour moi, Tintin n’est pas sacré car il fait partie du vieux continent mais parce que c’est un compatriote ! (Hé hé la Belgique s’exporte aux USA, attention, bientôt Paris sera moins prisée que Bruxelles !!! :o) ) J’ai grandi le nez dans ses aventures et je suis agréablement surprise par le film. J’avais peur que la version de Spielberg ne colle pas avec ma version à moi, mais non, j’ai bien aimé.
Moi aussi, j’ai adoré la scène d’ouverture avec ce clin d’oeil (on en dira pas plus !)
Bonne journée !
Quelle verve! J’adore ce post et tes critiques d’art et culture. Malgré tout le bien que je pense de S. Spielberg, je n’irais pas voir ce film. A 8 ans, j’avais juré que je me marierais avec Tintin et que nous allions parcourir le monde à la recherche de multiples vérités…Et dans ma toute puissance infantile nous étions en 2D et gouachés! Nan pas de 3D, pas de papa de ET sur notre chemin qui entacherait mon rêve d’enfant aussi agréable que soit son film!